jeu, 14 septembre 2023

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Interview de Hadda Hazem directrice du quotidien algérien El-Fajr

Montréal 9 Décembre 2019 – Madame Hadda Hazem  est directrice de publication du journal algérien El-Fajr, elle est de tous les combats quand il s’agit de la liberté d’expression en Algérie. Elle mena en 2017 une gréve de la faim de plusieurs jours pour protester contre les contraintes financières prises à l’encontre de son journal par certaines sphères de décision voulant museler ou mettre au pas cet important organe de presse algérien. Or, c’était méconnaître l’aura de Madame Hadda qui,contre vents et marées,a bravé la faim et de graves séquelles de santé qui en découlent,déterminée dans sa lutte n’a pas lâché une once du principe inaliénable de la liberté de la presse et d’expression.

Sollicitée à maintes reprises, Mme Hazem demeura constamment à l’écoute de toutes celles et ceux qui avaient besoin d’aide et de soutien.

Depuis Montréal,nous l’avons,souvent,interpellé Mme Hadda sur certains problèmes épineux concernant la communauté algérienne au Canada et bien d’ autres sujets d’ actualité qui intéressent la diaspora. En aucun moment, elle n’obstrua le lien de communication pour la rejoindre.
Pour Mme Hadda,s’enquérir du sort et des conditions de vie de nos compatriotes algériens qui vivent dans les deux hémisphères du globe est un devoir. Soutenir ses collègues journalistes qui vivent loin de la métropole est, également,un objectif qu’elle s’est fixée. Sur cette lancée,elle nous a accordé l’entrevue suivante dans laquelle elle exprime son point de vue sur le journalisme, la liberté d’expression et l’impact de la presse.

[list][item icon= »Select a Icon » ]Quels sont les défis auxquels fait face le journalisme en Algérie?[/item][/list]Le 1er défi auquel fait face le journalisme en Algérie est d’ordre économique. On ne peut pas faire face à la répression du pouvoir si on est déjà fragilisé financièrement;l’argent est le nerf de la guerre. Le manque de formation représente le 2eme défi pour la corporation puisque nous avons souvent affaire à des journalistes qui n’ont rien avoir avec ce noble métier. Le 3eme défi incombe au pouvoir qui verrouille toutes les sources de l’information or sans ces dernières le journalisme ne peut évoluer dans un climat saint.


[list][item icon= »Select a Icon » ]Le journalisme est-il un facteur de stabilité pour le pays ?[/item][/list]On ne peut construire une société moderne en l’absence des Médias qui jouent le rôle de médiateur entre le pouvoir et le peuple. Cependant, le pouvoir algérien perçoit la presse comme un adversaire voir un ennemi malheureusement ! La presse est l’un piliers sur lesquels une société se bâtit. Prenant exemple durant la décennie noire, la presse a fait front commun avec l’armée pour combattre le terrorisme.


[list][item icon= »Select a Icon » ]Que manque-t-il au journalisme en Algérie pour qu’il remplisse son rôle?[/item][/list]Le journalisme ne pourrai jouer son rôle si les conditions de travail ne s’améliorent pas. Il y a un manque conséquent dans la formation des nouveaux journalistes sans oublier les mauvaises conditions de vie des membres de notre corporation (Salaires bas, logements,…). Le non accès aux sources est également un frein important pour que la presse accomplisse aisément son rôle.


[list][item icon= »Select a Icon » ]L’arrivée des médias sociaux a-t-elle eu des conséquences sur le journalisme en Algérie ? Quelles sont-elles?[/item][/list]La venue des réseaux sociaux ont causé beaucoup de tord au journalisme étant donné que cela a permis à n’importe qui de s’improviser comme journaliste.Cela a également encouragé l’émergence des « Fake News » qui ont semé une véritable anarchie dans le monde l’information. Il y a par contre un autre versant du coté positif des médias sociaux quoi qu’ on ne puisse pas s’ assurer de la véracité de l’ information; on constate que grâce à eux l’information est beaucoup plus fluide et accessible et surtout elle arrive instantanément aux citoyens, de plus toutes les régions du pays sont couvertes. Les images et vidéos publiées sur les réseaux sociaux permettent d’amplifier leur impact.

Je tiens à préciser aussi que cette nouvelle ère médiatique sonne le glas aux journaux version papier qui vivent une véritable fin de règne dans le monde de l’information. Vivement la fin du papier qui a permis aux éditeurs de se libérer du dictât des imprimeurs et des distributeurs qui érigent des empires colossaux sur le dos des journaux.

[list][item icon= »Select a Icon » ]La presse algérienne a-t-elle une mission à accomplir ?[/item][/list]La presse algérienne comme toutes les presses du monde doit assoir un système démocratique pour notre pays. On doit préserver pour cela les acquis des événements du 5 Octobre 1988 contre l’intégrisme islamiste. Nous sommes tenus à veiller aux valeurs de Novembre 1954 qui aspirent à fonder une société moderne dont le projet primordial prône l’ouverte toutes les cultures universelles.

Nous devons comme journalistes être la Voix du citoyen et en première ligne défendre l’unité du pays et combattre tout projet visant à le démembrer.

Interview réalisée par Wahid Megherbi

Hafsa Djenadi, une romancière algérienne à la plume prometteuse.

Dans une tentative de la part de la rédaction du journal de faire connaitre de nombreux talents maghrébins qui nous régalent avec leurs productions littéraires et artistiques; nous allons inaugurer cette féconde tradition en allant à la rencontre d’une écrivaine native de Bejaia Hafsa Djenadi, auteur de  « La Miséreuse insoumise » et de « Au-delà de nos rêves ».

Notre jeune romancière et scénariste est passionnée par la littérature française et francophone. Elle poursuit sa thèse de doctorat actuellement à la Nouvelle Sorbonne, Paris et s’intéresse plus particulièrement à la littérature Maghrébine féminine.

M.Amine Kenida l’a questionné sur divers sujets concernant son travail et son engagement dans l’écrit littéraire .


Bonjour Hafsa. Pourriez-vous m’en dire un peu plus à propos de « La Miséreuse 
insoumise » et nous dire à quel lectorat s’adresse-t-il ? 
C’est l’histoire d’une femme divorcée livrée à une société qui rejette ce statut, surtout dans les années 90. Mira est une femme qui a lutté pour donner une meilleure éducation à son fils. Faisant face à la compression familiale et sociale. Une femme qui a connu l’amour beau et passionnant à son envol, puis hideux et blessant à sa fin.

Qu’est-ce qui vous a poussé à écrire ce livre ? 
Je suis une grande observatrice.Tout ce que je vois, je le décris par l’écriture. J’ai commencé par un scénario. Puis j’ai été contactée par une femme qui a voulu me raconter son histoire. Je l’ai écoutée. J’ai été touchée et très sensibilisée. Cette injustice devait être dénoncée. Et j’ai écrit un livre. La Miséreuse insoumise.

Quels ont été vos processus d’écriture, de l’idée à sa finalisation ? Combien de temps cela vous a-t-il pris ?
J’ai recueilli d’abord cette histoire pendant 6 mois. Mon témoin me racontait son vécu en kabyle, et moi je devais prendre des notes en français sur un bloc-note. Puis je me suis miseau véritable travail. La saisie et la narration. C’était mon premier roman, je l’ai écrit à la première personne du singulier «  je ». J’ai laissé mon personnage s’exprimer tout au long du livre. Parfois ma propre voix figurait. Mais je ne voulais pas étouffer celle de Mira, mon personnage principal. J’ai fini la rédaction de ce roman en 2009, mais j’ai dû le revoir et le réécrire en 2013 quand j’ai enfin trouvé un éditeur.

Quelle(s) difficulté(s) avez-vous rencontré pendant l’écriture de ce livre ? Comment les avez-vous surmontées ?
Il n’est facile de recueillir une histoire en une langue et de l’écrire avec une autre langue. Mirame racontait en kabyle, je devais rapporter les faits en français. Certaines expressions ne se traduisaient pas. Puis j’ai hésité sur le style à adopter, les temps à utiliser et les voix à mettre en avant ; la mienne ou celle de Mira. S’ajoutait à cela le va et vient chez cette dame. J’ai partagé mon année 2006 entre mes études à l’université, la création d’un club littéraire et les multiples rencontres avec Mira. Au début, je n’arrivais pas à gérer toutes ces fonctions, vue la surcharge des cours et les tâches au club car j’étais la présidente. Mais avec le temps, j’ai pu m’organiser. C’était la plus belle période ma vie. Car j’aimais ce rythme et cette belle aventure.

En l’écrivant, aviez-vous conscience des réactions qu’il pourrait susciter ? Est-ce que cela a influencé votre écriture ?
Ecrire cette histoire était tout d’abord une expérience humaine. Je n’avais que 21 ans et je savais déjà des choses que j’ignorais avant. Je ne pensais pas aux réactions des gens au départ, je ne pensais qu’à cette femme et à la façon de la soulager, car il y avait des moments où elle faisait des crises d’angoisse quand elle se rappelait des événements traumatisants. Donc, mon but initial était de répondre à son désir : écrire son histoire pour qu’elle serve d’exemple et la soulager du poids des événements. Cette histoire m’a ouvert les yeux et a influencé plutôt mon style d’écriture : j’ai décidé d’écrire à la première personne du singulier, afin d’impliquer chaque lecteur dans les histoires que je rapporte. Une façon de créer des liens proches et profonds entre mes personnages et les lecteurs.

Justement, qu’en a pensé votre famille ?
J’ai été encouragée par chaque membre de ma famille. Ils étaient tous fiers et contents de ma démarche. Mes parents et mes sœurs sont mes premiers lecteurs. Ils m’ont soutenue jusqu’au bout et me soutiennent encore. Car ils savent que je suis passionnée par l’écriture.

Qu’est-ce qui vous a donné envie d’écrire ce livre ?
L’histoire en elle-même a mérité d’être connue et transmise. Puis l’injustice m’insupporte, m’irrite et me frustre. Alors j’ai saisi l’écriture comme un moyen dénonciateur et aussi salvateur. Il y’a un message dans ce livre. Un message pour les hommes, pour les femmes et pour les enfants. Un message pour la société et pour les inconscients.

Avez-vous toujours eu envie d’être écrivaine ?
Sincèrement ? J’ai toujours aimé écrire et publier mes textes quand j’avais 16 ans dans le journal Les Nouvelles Confidences. Mais le titre de l’écrivain, je n’y ai jamais pensé. À la base je voulais être journaliste. Une fois à l’université, j’ai découvert de plus près le monde littéraire qui m’a séduite. Et je suis tombée amoureuse passionnément de l’écriture. Et j’ai décidé d’écrire des livres.

Qu’aimez-vous lire ?
Je lis un peu de tout. Mais je suis une fervente de la littérature féminine. Je lis énormément du Mokeddem, du Bouraoui, du Djavann, du Laurens, du Chapsal, du Giroud… et j’aime lire les témoignages. Cela ne m’empêche pas de lire les auteurs masculins, dont les classiques. Je m’apprête beaucoup plus à la littérature contemporaine.

Comptez-vous écrire un autre livre ?
« Au-delà de nos rêves » est mon deuxième roman. Il est déjà édité en France depuis 2015. Et je viens d’achever mon troisième roman. Quand on commence à écrire, je crois que rien ne peut nous arrêter. Ça coule dans les veines. D’autres projets d’écriture sont en cours de réalisation.

Avez-vous eu envie de toucher un lectorat particulier ? Des jeunes femmes, des hommes ?
Tout le monde est le bienvenu. Tout le monde est visé.

Quels conseils donneriez-vous à une personne qui souhaite écrire un livre ? 
Ecrivez quand vous avez envie et quand vous avez la passion et l’inspiration. Essayez de vous faire éditer. Et n’abandonnez jamais vos projets d’écriture. L’écriture est bénéfique pour vous et pour vos futurs lecteurs.

Enfin, où peut-on se procurer votre livre ?
« La Miséreuse insoumise » est disponible en France ( Publibook, 2013) et en Algérie ( Le Montagnard, 2017).
« Au-delà de nos rêves » est disponible uniquement en France ( Edilvre 2015), et j’espère très prochainement en Algérie.

Merci Hafsa d’avoir partagé avec sincérité votre expérience d’auteure.

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Interview réalisée par Amine Kenida